Bien sûr. C’est une stratégie ambitieuse et large qui est engagée. Une partie concerne la transparence des acteurs de la vie publique, l’autre la lutte contre la fraude et la délinquance économique et financière. Pour renforcer cette dernière, deux instances seront créées. Un parquet financier spécialisé avec des moyens d’enquête accrus. Et un office central de lutte contre la fraude et la corruption, avec des moyens issus des ministères de l’Intérieur, de la Justice et des Finances. Quand on articule ces moyens, qu’on mutualise les outils les plus efficaces, on crée les conditions d’un meilleur contrôle.
Nous voulons revisiter la liste des Etats non coopératifs, qui comporte aujourd’hui 8 noms. Le précédent gouvernement avait constitué cette liste qui s’était peu à peu réduite quand les pays acceptaient de signer des conventions avec la France. Désormais, nous allons prendre en compte le caractère effectif du respect des engagements par les pays. Dans certains cas, les conventions fiscales ne garantissent pas le niveau d’information dont la France souhaite disposer. Il faudra s’assurer de l’efficacité de l’échange d’informations. Et nous allons plaider pour la mise en place d’accords d’échanges automatiques d’informations au sein de l’Europe, et de l’Union avec des pays tiers, pas seulement la Suisse. La loi bancaire va permettre en outre de contraindre les banques à faire toute la transparence sur leurs activités dans les paradis fiscaux. On pourra encore compléter ces dispositifs au Parlement, nous sommes désireux de tenir compte des propositions des élus.
Nous sommes ouverts par principe au débat, mais il faut d’abord renforcer ce qui existe plutôt que d’empiler des mesures nouvelles. L’élargissement de l’assiette de l’« exit tax » est une piste intéressante, car aujourd’hui toutes les plus-values mobilières ne sont pas comprises dans l’assiette. En revanche, concernant les successions, qu’il est proposé d’y inclure, notre législation prévoit déjà que la France perçoive les droits de succession si l’héritier, le bien ou le défunt est en France. Je suis également favorable à tout ce qui permettra de rendre plus efficace la lutte contre les domiciliations fiscales artificielles.
Je ne veux en aucun cas remettre en cause la protection des sources des journalistes. Je me suis assez battu comme parlementaire pour que ces sources soient protégées et garanties, pour ne pas vouloir aujourd’hui y porter atteinte. Mais on peut communiquer des informations sans les sourcer. Et un ministre du Budget ne peut pas ne pas demander des éléments d’informations qui permettraient de prouver une infraction fiscale. Toute autre position de ma part serait incongrue, étonnante et baroque. Et je n’ai pas l’intention d’être un ministre du Budget baroque.
C’est un vrai sujet. Je veux que l’on regarde sa faisabilité juridique pour ne pas fragiliser les procédures. Je pense qu’on devrait pouvoir parvenir à exploiter dans les meilleures conditions de droit toutes les sources : celles qui ont été recueillies au départ de manière illicite peuvent ensuite être transmises à l’administration fiscale de manière licite par le juge.
J’entends dire ici ou là que nous n’agirions pas, c’est totalement faux ! Le document transmis à l’administration fiscale à l’initiative du procureur Eric de Montgolfier concernait 6.313 noms. Sur ce total, on comptait 2.846 personnes physiques disposant d’une adresse en France et présentant un encours bancaire positif (la plupart des autres avait un encours nul ou négatif, mais ces personnes sont sous surveillance dans le cadre du fichier des évadés fiscaux EVAFISCV). Une stratégie de contrôle fiscal a été engagée : 900 sont déjà achevés, portant sur les enjeux les plus importants. Il y a eu 86 plaintes pour fraude fiscale engagées. Au total, 178 millions de droits et pénalités ont déjà été mis au recouvrement, et les contrôles vont se poursuivre jusqu’à l’exploitation complète de la liste.
Il est déjà spectaculaire ! Le contrôle a généré 18 milliards d’euros de droits et de pénalités, soit 10% de plus qu’en 2011. Le contrôle sur place a conduit à 12,3 milliards de droits et pénalités, et le contrôle sur pièce a généré 5,8 milliards. J’insiste sur un point : les droits et pénalités correspondant à la lutte contre les fraudes les plus graves ont représenté à eux seuls plus de 6 milliards d’euros, soit 45% de plus qu’en 2010. Et 1.157 dossiers ont été transmis à l’autorité judiciaire.
Ce débat est toujours intéressant dans l’esprit, mais il y a la réalité. La réalité, c’est que nous n’avons aucune chance de retrouver la croissance sans le rétablissement des comptes ! Si on ne réduit pas le déficit, alors les taux d’intérêt augmenteront, l’investissement sera pénalisé et nous ne serons plus maîtres de notre destin. Ces ministres qui s’expriment ne font rien d’autre que de souligner l’une des préoccupations du président de la République, à savoir la croissance. Mais après, il y a la question de l’opportunité de le faire dans une période agitée. Mieux vaut qu’ensemble, dans la cohérence, nous affichions nos états de service, plutôt que nos états d’âme.
Je veux insister sur la maîtrise qui est engagée des dépenses publiques. Elles avaient progressé de 2 % par an en volume entre 2002 et 2012. L’an dernier, nous avons ramené la progression à 0,7 % et nous réaliserons 0,5 % par an en moyenne sur la législature. Les dépenses de l’Etat hors retraite et charge de la dette diminueront en valeur absolue de 1,5 milliard en 2014. Nous nous appuierons sur les 40 audits de politique publique engagés et sur les discussions que je mène avec les ministres. Les économies, nous les trouverons ligne par ligne.
Nous reviendrons sous les 3 % en 2014. Surtout, il faut regarder l’évolution du déficit structurel, qui neutralise les effets de la conjoncture et sur lequel nous serons jugés en priorité. Qu’en est-il ? Le déficit structurel a augmenté de 1,8 point de PIB entre 2006 et 2011. Il a diminué ensuite en 2012 de 1,2 point et sera réduit de 1,8 point cette année, et à nouveau de 1 point de PIB en 2014, ce qui fera une diminution de 4 points en trois ans. Cela nous permettra de ramener le déficit structurel à seulement 1 % de PIB l’année prochaine. Ces engagements très forts, nous les matérialiserons avec Pierre Moscovici dans le programme de stabilité et ils témoigneront auprès de la Commission et des Etats membres de l’Union de notre volonté de tenir nos objectifs. Pour être crédibles dans la réorientation de la politique économique européenne, nous devons être sérieux sur le redressement des finances publiques.
Avr 11
Cet article a été posté le jeudi, 11 avril, 2013 à 12 h 38 min et est classé dans Economie. Vous pouvez suivre les réponses à cet article via le Flux RSS 2.0. Les commentaires et les Rétrolients sont clos pour le moment.
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